Paroisses
La quête en ligne !
Faire un Don
Faire un signalement
Faire dire une messe

Diacres et bientôt prêtres

L’un est déjà une figure de l’Église de Corse sur la rive Sud du golfe d’Ajaccio, l’autre exerce son ministère dans le Sartenais. L’un est Corse, l’autre Camérounais. Les diacres Ange-Marie Bastelica et Igor Tsayim seront ordonnés prêtres par l’évêque de Corse, le cardinal Bustillo, le 9 juin dans la cathédrale Santa Maria Assunta.

Par : Roger ANTECH

Ange-Marie Bastelica : « L’Eglise de Corse a besoin de pasteurs »

Ce passage de l’état de diacre permanent à celui de prêtre, pourquoi maintenant ?

Vingt-sept ans après l’ordination diaconale, il m’est difficile de répondre. Le rendez-vous n’a pas eu lieu avant, et le moment se présente maintenant. Le père Brunin l’avait abordé avec moi à Assises lors d’un voyage de l’Espérance du Secours catholique. Le cardinal Bustillo m’a, à son tour, posé la question. Le père Constant m’en a parlé. D’autres amis prêtres m’ont encouragé sur ce chemin.

Ce moment, les paroissiens du secteur de Porticcio l’attendaient aussi…

Ils n’arrêtaient pas, en effet, de me demander pourquoi je n’allais pas plus loin. Le père Christophe Boccheciampe m’a mis en confiance dans tout ce que j’entreprenais, auprès de lui et d’eux. J’ai travaillé pendant 36 ans dans l’agence immobilière familiale. Je suis aujourd’hui à la retraite, et célibataire. Prêt dans ma tête, dans mon cœur, dans mon esprit et, j’oserais ajouter, vu mon âge, plus que mûr maintenant. Mais c’est vrai, les paroissiens s’interrogeaient. Lors de la bénédiction des maisons à Bastelicaccia, l’un d’eux à qui je faisais part de ma décision, m’a lancé : « Era Tempu ». On ne peut pas dire mieux (rires).

C’est aussi l’accomplissement d’un long chemin…

Je racontais à des pères du séminaire que, dès l’enfance, chez mon oncle à La Sposata, j’entraînais mes cousins en procession, et je commençais à célébrer la messe pour eux. Dans le quartier San Carlu, puis à la cité des Cannes à Ajaccio, plus loin lors des études à Nice, où j’ai redécouvert le chemin de l’église avec les religieuses Clarisses de Cimiez, j’ai toujours profondément vécu dans la foi. J’ai fait un an de séminaire à Marseille, mais ça n’avait pas accroché à l’époque. Un ami prêtre m’a par la suite parlé du diaconat. Mgr Lacrampe m’a appelé. Gaston Pietri m’a enseigné, puis accompagné.

Le ministère diaconal vous a-t-il préparé à devenir prêtre ?

Tout est allé en crescendo. Il faut trouver ses marques. Plus les années passent, plus tu prends de l’assurance. Tu entends les encouragements des amis prêtres, des diacres, des paroissiens, ça aide dans la réflexion, ça approfondit tout ce que je vis maintenant. Je n’aurais pas dit oui, sans cela. La célébration des mariages, des baptêmes, des enterrements, l’aumônerie du Secours catholique, une expérience fondatrice et exceptionnelle, tout cela m’a forgé, m’a fortifié.

Qu’est-ce qui va changer dans votre vie religieuse ?

Le prêtre a directement en charge une communauté, les responsabilités sont plus fortes. Depuis le départ du père Christophe pour Corte, j’administre, sur le terrain, 14 paroisses. Je vois la charge qui pèse sur les épaules du prêtre pour tout organiser. Il lui faut une équipe soudée et dévouée. Les fidèles vous identifient comme le pasteur.

L’Église manque de prêtres et de vocations…

L’Église de Corse a besoin de pasteurs. Cette attente pour le service de l’Église, oui, je l’ai ressentie. En la vivant de l’intérieur, à la rencontre des fidèles et des jeunes, et des confréries aussi, j’ai pu percevoir ce lien unique des Corses pour leur Église, cette attention très enracinée aux traditions, cette manière si singulière de faire vivre notre foi.

Les défis ne manquent pas ?

Il nous faut rassembler le plus de fidèles possible. Et surtout, être présent sur le terrain, à l’écoute des gens, faire vivre nos paroisses. On ne peut pas y aller uniquement pour célébrer des obsèques. Il ne faut pas abandonner nos paroisses rurales, car elles sont une richesse. C’est extraordinaire de voir comment, dans ce temps pascal, les gens attendent la bénédiction des maisons. L’Église rentre chez eux.

Être ordonné prêtre dans cette cathédrale prend-il un sens particulier ?

Je suis né rue Zevaco-Maire, j’ai été baptisé dans cette cathédrale, j’ai été ordonné diacre ici, c’est mon quartier, c’est toute mon enfance. C’est une émotion particulière. La cathédrale est pour tous les Ajacciens, le cœur de la cité, de la vieille ville. Je partage cette joie qui m’envahit avec tous les miens, qui espéraient ce moment. Je me place au service de l’évêque. Ce qui viendra après est entre ses mains.

Igor Tsayim : « Je n’ai rien mérité et voici qu’Il m’a tout donné »

À quel moment avez-vous reçu l’Appel ?

Toute vocation a un côté mystérieux et, dans mon cas, il est difficile de donner un repère temporel. Pour être sincère, je n’ai pas entendu à un instant T, comme le jeune Samuel, la voix de Dieu qui m’appelait, encore moins rencontré Jésus comme les premiers disciples pour qu’Il me dise de vive voix : « Viens et suis-moi ». J’ai honte de le dire, mais je crois qu’il est dangereux de le taire : Dieu a utilisé l’épreuve de la maladie et les choses les plus belles et banales de la liturgie pour m’adresser son appel à le servir. Au premier temps, c’est ainsi que la beauté des gestes liturgiques m’attiraient, avant de devenir plus tard un appel à suivre le Christ en le servant.

L’ordination presbytérale est une étape majeure sur un long chemin de préparation. Comment l’avez-vous accomplie et vécue ?

Je crois que cette belle aventure vocationnelle aura son total accomplissement uniquement lorsque je serai resté fidèle aux engagements pris devant l’évêque et qu’au crépuscule de ma vie, j’entendrai le bon Dieu me dire : « Serviteur bon et fidèle, entre dans la joie de ton maître, tu as été fidèle en peu de choses, je t’en confierai beaucoup d’autres. » Maintenant, on peut juste parler d’une nouvelle mission et d’un gros challenge qui commence avec l’ordination sacerdotale : aller à la recherche des brebis perdues, prendre soin de celles qui sont malades tout en veillant à ce que le reste du troupeau ne se disperse pas.

Passer de l’état de diacre à celui de prêtre, cela signifie quoi pour vous ?

Pour vous répondre, permettez-moi d’utiliser un raisonnement mathématique : cela signifie passer au service du peuple de Dieu « au cube ». Non pas que je minimise le diaconat, qui reste un puissant levier pour l’essor du service de la charité, exercé sous la direction de l’évêque diocésain.

Allez-vous servir l’Église différemment ?

Je répondrai à la fois non et oui. Non, parce que le service au sein de l’Église est le même. Diacres, prêtres et évêques, nous sommes tous des serviteurs. Serviteur de l’unique Dieu qui se fait présent dans le prochain. Maintenant, je pourrais dire oui, parce qu’en fonction des ministères qui nous sont confiés, nous servons à des degrés ou des fonctions différentes, mais participant toujours à l’unique sacerdoce du Christ.

Avoir la charge d’une communauté de chrétiens, comment l’appréhendez-vous ?

Je n’y pense pas beaucoup pour le moment, car cela entre dans le cadre des nominations. Ce n’est pas automatique. C’est l’évêque qui, dans sa liberté souveraine, décide à qui confier telle ou telle communauté. Mais la diversité dans l’unité est une grande richesse et un grand atout pour la pastorale du prêtre.

Vos origines sont au Cameroun, ressentez-vous ce lien particulier qui unit les Corses à l’Église et la foi ?

Oui ! Vous faites bien de parler du Cameroun. C’est le pays le plus beau après la Corse. Non, je rigole. Justement, le lien est là. Nous avons cette grande chance que l’Église catholique est universelle. C’est vrai qu’il y a le phénomène d’inculturation qui colore un peu chaque église locale, mais les principes essentiels de la foi et de la liturgie restent les mêmes partout. Le Christ que nous aimons et célébrons est le même partout, hier et aujourd’hui, et le sera encore demain. Du moment où Il nous unit, tout le reste n’est qu’accessoire.

Êtes-vous dans un état de joie ?

Oui, je suis dans la joie et l’action de grâce. Je n’ai rien mérité et voici qu’Il m’a tout donné au point de me faire participer à l’unique sacerdoce du Christ, son Fils. Quelle folie d’amour ! Quel amour incommensurable et de prédilection pour moi. Je veux simplement dire Deo Gratias et Lui demander la grâce de la persévérance.

Partager