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Homélie, Messe du 16 octobre 2022

Dans l’Evangile de saint Luc, Jean le Baptiste annonce la conversion, le changement, à des personnes de différentes catégories sociales (cf. Luc 3,10-14). Ces personnes posent toutes la même question au prophète : « Que devons-nous faire ? ».

Après un temps de travail synodal dans notre diocèse au sein de nos communautés, des unités paroissiales et des doyennés, nous pourrions nous demander nous aussi, comme les chercheurs de sens proches de Jean-Baptiste : et nous, en Corse, que devons-nous faire ? Notre Eglise, que doit-elle faire ?

Je ne vous propose pas un programme ou une stratégie à suivre. Je ne suis pas un vendeur de rêves ou un directeur de marketing visant de bons résultats par la pression. L’Eglise n’a pas vocation à produire mais bien à être féconde. 

L’enseignement de la Parole de Dieu

Partons de la Parole de Dieu de ce dimanche. Elle est la lumière de nos pas et la lampe sur notre route (cf. Psaume 118,105). Trois termes peuvent nous éclairer dans notre mission : le combat, la transmission et la persévérance.

Le combat : Dans la première lecture, Josué est sur le terrain de combat avec ses hommes. Moïse avec son frère Aaron et Hour sont sur la montagne. Ils prient. Moïse lève les mains pour soutenir le combat de la plaine. Puisque notre vie, de la naissance à la mort, comporte une part de lutte, il faut s’y préparer afin d’être solide et d’en sortir victorieux. Le combat est d’abord intérieur, pour pacifier et unifier notre être. Si nous sommes divisés, nous sommes perdus. La prière renforce et soutient toute notre vie relationnelle et pastorale.

La transmission : Paul écrit à Timothée pour l’encourager. Garde le trésor que tu as reçu, sois fidèle dans la transmission. Pour garder et transmettre il faut s’appuyer sur l’Ecriture : enseigne, dénonce le mal, redresse, éduque dans la justice, proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps, fais des reproches, encourage, toujours avec patience et souci d’instruire. Il s’agit d’un beau programme de sagesse spirituelle et missionnaire.

La persévérance : La parabole de la veuve de l’Evangile est un enseignement pour prier sans se décourager. L’attitude de la veuve nous apprend à mieux vivre notre foi dans l’insistance, la confiance et la persévérance. En effet, aujourd’hui, avec trop de facilité, face aux difficultés, aux refus et aux échecs, nous démissionnons. Nous avons perdu, sans doute, la persévérance cordiale. Les résistances d’autrui à nos désirs ou projets missionnaires nous laissent abattus, déçus et frustrés. Cette veuve nous apprend à dépasser une attitude fataliste et triste, afin de rejoindre avec tact le cœur des personnes pour avancer ensemble en Eglise. Si l’on vous chasse d’une ville allez dans une autre (cf. Matthieu 10,23) sans violence…Jésus nous précède en Galilée !

L’enseignement de notre réflexion synodale.

D’après la synthèse de nos échanges, je retiens quelques orientations pour notre Eglise en Corse. 

1. Le principe de communion. Un royaume divisé ne peut pas subsister (cf. Marc 3,24). Les prêtres, diacres, religieux et religieuses sont des moteurs missionnaires d’un diocèse. Notre communion interne doit être adulte et mature. Sans communion point de témoignage. Nos différences légitimes ne doivent pas glisser dans la division. Les acteurs de la vie ecclésiale doivent être des modèles de disponibilité, d’accueil et de patience. Les personnes frappant à la porte de nos églises méritent un accueil digne de l’Evangile. 

2. Développer la proximité. Dans nos villes et nos villages les croyants et pratiquants ne peuvent pas être des personnes distantes ou indifférentes aux autres. La bienveillance relationnelle doit être le signe de la volonté de bâtir une famille ecclésiale accueillante. 

3. Enfants, jeunes et catéchumènes sont l’avenir de l’Eglise. Ils apportent leur fraîcheur et dévoilent à nos communautés un même défi. J’encourage les catéchistes et animateurs à les accompagner généreusement, en leur offrant temps et talents. Dans l’univers des « jeunes chrétiens » tous les prêtres, diacres, catéchistes et animateurs doivent oser la créativité missionnaire, la communication claire et l’accompagnement responsable. 

4. L’organisation interne. Nos unités paroissiales et doyennés doivent s’organiser pour mieux accueillir les chrétiens ponctuels ou lointains. Que les coordonnées pour rejoindre nos communautés soient aisément accessibles, pour leur faciliter le contact. Il est possible de faire appel à des bénévoles pour des temps d’accueil dans les églises ou dans les maisons paroissiales. Une bonne organisation interne participe à la qualité de l’accueil des personnes désireuses de nous rencontrer.

5. Les « lointains ». La mission ad intra est juste et naturelle, elle fait partie de notre vie ordinaire. Mais l’Evangile n’encourage pas une mission de conservation de l’espace et de l’espèce catholiques ! Vous l’avez souligné : les personnes éloignées par leur histoire, leur culture ou leurs blessures font partie de nos priorités pastorales. Pour ces personnes, nous devons soigner la communication, l’action et la coordination de nos responsabilités : elles nous attendent. Pourquoi ne pas organiser, par exemple, un temps par semaine (un matin ou un après-midi) de mission gratuite ? ou un temps par mois (un week-end) ? ou une semaine missionnaire par an ?  Les personnes de nos quartiers, de nos villes et de nos villages attendent des missionnaires enthousiastes pour une écoute, un conseil, un encouragement.

6. Les confréries. Par leurs statuts et leur histoire, les confréries de Corse sont une bénédiction pour l’Eglise et la société. Nos consœurs et nos confrères peuvent nous aider à incarner le visage de la solidarité et de la fraternité dans nos lieux de vie. Leur charisme les pousse à aller au-delà du cultuel et du culturel pour voir et soutenir les plus démunis et les plus isolés de notre société. Ils sont porteurs d’une belle identité corse qui n’est pas indifférente aux personnes vulnérables de nos familles et de notre société.

7. La pauvreté. En Corse nous connaissons tous de graves pauvretés sociales. Nous ne pouvons pas nous limiter à constater les difficultés que les médias nous communiquent. L’Eglise les perçoit mais elle doit aussi agir et proposer des changements. Avec les associations et tous ceux qui travaillent ici pour les plus démunis, soyons acteurs et créateurs d’une société plus humaine, plus solidaire et bienveillante.

8. Les laïcs. Vous êtes les plus nombreux au sein de l’Eglise. Sans vous, la famille est amputée du génie vivant dans le monde. Être des témoins de qualité nécessite de se former pour une meilleure connaissance de l’histoire, de la Bible, de notre spiritualité. Je vous fais confiance pour que vous soyez dans le monde le signe d’un Dieu présent et agissant. N’hésitez pas à nous interpeller pour que nos comportements et nos paroles soient plus justes, nos liens avec la société actuelle ajustés. 

9. La vie spirituelle. Notre action sans âme ne serait que tactique et stratégie. La mission exige une vie spirituelle soignée. Par nos célébrations et nos temps de prière, qu’ils soient communautaires ou personnels, il est juste de favoriser une vie intérieure dense, habitée. Je vous invite à ne pas être avares quant aux propositions spirituelles. Offrons des temps pour Dieu et avec Dieu. A notre époque le silence n’est pas un danger mais un privilège. 

10. Le présent et le futur de notre Eglise. Nous sommes dans une terre de tradition où, aujourd’hui, la transmission est en danger. Jeunes ou pas, tous ont soif de Dieu, de réconfort spirituel et de consolation humaine. Notre mission demande de l’audace pour réveiller ou ressusciter le goût de vivre dans la joie et la sérénité. Un chrétien est porteur de vie et d’avenir. Pour cela il nous faut sortir des formalismes et volontarismes afin d’être libres. La Corse a besoin d’un puissant souffle de l’Esprit Saint pour grandir en maturité missionnaire. Je crois que nous avons tous le désir d’être meilleurs, plus pacifiques, moins violents, plus accueillants et bienveillants. C’est l’orientation de l’Evangile.

Alors, chers amis, que notre foi et que notre joie de croire se voient dans nos visages et dans nos comportements. L’Eglise de Corse a un potentiel extraordinaire pour annoncer le Christ. Ouvrons-lui des chemins !

Par la Vierge Marie, patronne de la Corse, je vous invite à dire « oui » au projet de Dieu sur nous. Vivons l’aventure de la foi sans arrogance et sans complexes. 

Sainte Dévote et sainte Julie, intercédez pour nous !

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