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Transhumanisme : quelles limites ?

Le transhumanisme, avec ses concepts d’homme augmenté ou encore d’intelligence artificielle, suscite un certain nombre de peurs et provoque des débats passionnés. Parmi les questions soulevées figure celle des limites.

Nous sommes en effet des êtres limités. Confrontés à nos limites depuis notre plus tendre enfance, nous faisons l’expérience de ne pas pouvoir réaliser tous nos désirs, de ne pas être tout-puissants. En même temps, l’homme a toujours lutté contre ses propres limites, cherchant sans cesse à les repousser plus loin.  Cette lutte tourne parfois au drame ; que l’on pense à Icare… Mais elle a évidemment quelque chose de positif et a souvent été source de progrès. L’homme d’aujourd’hui a largement dépassé, ou plutôt contourné, les limites de la pesanteur et peut traverser l’Atlantique en quelques heures…

D’où vient ce besoin de dépassement ? Pour une part du fait que, tout en faisant l’expérience de sa finitude, l’homme découvre en lui-même un désir de plénitude et d’éternité.  Il est un être fini habité par un désir infini, un peu comme une 2 CV équipée d’un moteur de Porsche… d’où cette tension intérieure, ce besoin d’aller au-delà de ses limites.

Cela signifie-t-il que Dieu a fait de nous des êtres frustrés ? Non, bien sûr. Paradoxalement, ces limites peuvent être une opportunité pour grandir. Si nous voulons bien ne pas les refuser systématiquement, elles nous aident à nous libérer de nos désirs de toute-puissance et d’indépendance absolue. Ce que je ne peux pas faire seul, je pourrai le faire avec d’autres.

Le prototype de cette heureuse dépendance est le couple homme/femme. Ni l’un ni l’autre ne peuvent avoir un enfant tout seul. Pour cela, ils ont besoin l’un de l’autre. L’acceptation de leur limite est donc l’occasion de découvrir la joie de se « compléter » mutuellement. Grâce à cette limite, ils découvrent leur vocation à l’amour qui, par définition, est un mélange de don et d’accueil de l’autre. Que deviendrait l’amour si je n’avais pas besoin de l’autre et s’il n’avait pas besoin de moi ?

Plus fondamentalement, nos limites sont une invitation à nous tourner vers Dieu. « Dieu viens à mon aide » chantons-nous au début de la prière de l’office. L’homme grandit en humanité lorsqu’il reconnait avoir besoin de Dieu. Cette dépendance assumée, cette pauvreté de cœur, devient ainsi le prélude à une relation fondée sur l’amour et appelée à s’épanouir en vie éternelle.

Il nous faut donc être présent dans les débats liés au transhumanisme, en évitant cependant d’en rester à des considérations d’efficacité ou de bien-être à court terme. Poser la question des limites permet d’enrichir le débat en prenant de la hauteur car cela renvoie à l’ultime limite qui nous concerne tous, celle de la mort.

Les progrès de la science ont permis de repousser cette ultime limite, et c’est tant mieux.  Mais il y aurait quelque chose d’absurde à vouloir simplement prolonger l’espérance de vie sans regarder en face l’inéluctable limite. Pour une personne âgée, il ne s’agit pas tant de dépasser ses propres limites que de consentir à les voir se rétrécir. A l’opposé de l’euthanasie, qui apparaît comme une ultime révolte de l’homme face à sa condition d’être limité, se situe une invitation – certes délicate – à faire confiance, à remettre sa fragilité, et même sa vie entière, entre les mains du Créateur. Ainsi, grâce à Dieu, s’ouvre un chemin vers la plénitude, vers la joie illimitée !

Olivier de Germay
Evêque d’Ajaccio

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