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Le dimanche

La tradition chrétienne en ce qui concerne le Dimanche ne peut se comprendre sans un regard attentif sur ce que dit la Bible sur la semaine et le jour de la semaine appelé « Le Jour de Yahvé » dans le récit biblique. Vient ensuite le passage que représente, dans le Nouveau Testament, la foi en la Résurrection. Viennent enfin les bouleversements qu’ont connus nos sociétés. Qu’en est-il de ce jour devenu le Dimanche d’abord dans la vie ecclésiale et progressivement dans la société ? D’où provient-il ? Croyants, mais aussi agnostiques et incroyants, ont besoin de le savoir.

Un jour à sanctifier

Le récit de la création, qui ouvre le livre de la Genèse, épouse pour l’œuvre créatrice de Dieu le rythme de la semaine. Ces sept jours, qui depuis des siècles constituent la semaine, comportent un sommet : ce septième jour (shabbat) qui associe le repos et une « consécration » qui est de la part de l’homme la reconnaissance de Dieu. Pour la Genèse, reconnaissance de Dieu dans sa création, pour le livre de l’Exode reconnaissance de Dieu dont le peuple a reçu l’arrachement à sa condition d’esclavage en Egypte (la Paque).

Dans la tradition biblique, le repos du Shabbat est à la fois l’abstention de toute sorte de travail et la sanctification du temps symbolisée par ce jour qui sera ainsi le jour de Yahvé. Jésus en fils d’Israël, au temps de sa vie historique, observe le shabbat, en même temps qu’il le libère de ses déformations légalistes : « le shabbat a été fait pour l’homme et non l’homme pour le shabbat » (Mc. 2, 27).

On ne peut donc dire que le christianisme ait rompu avec le shabbat. Il n’a pu toutefois le ratifier, en reprenant la Loi à travers les « Dix paroles », sans introduire la part de nouveauté apportée par le Christ. Continuité et discontinuité s’entremêlent.

Le premier jour de la semaine

Les récits évangéliques sur la résurrection de Jésus mentionnent expressément le « premier jour de la semaine ». Marc : « de grand matin » (Mc. 16, 2) — Matthieu : « comme le premier jour de la semaine commençait à poindre » (Mt. 28, 1) — Luc : « le premier jour de la semaine, à la pointe de l’aurore » (Lc. 24, 1) — Jean : « le premier jour de la semaine, Marie de Magdala se rend de bonne heure au tombeau » (Jn. 20, 1). Ainsi en est-il de la venue empressée de ces femmes disciples vers le tombeau de Jésus. Avant toute manifestation, il y a ce constat du tombeau vide et l’interrogation qui en a résulté.

Dans l’empire romain ce premier jour est le « jour du soleil » (« dies solis ») et pour les juifs il est le lendemain de ce jour si particulier qu’est le shabbat par lequel se termine la semaine. 

De ces récits évangéliques part très naturellement l’idée de faire de ce « premier jour de la semaine » le Jour de la Résurrection. D’entrée de jeu il sera pour les croyants en Christ le « Jour du Seigneur ». Ce n’est pas une façon de substituer à ce jour du shabbat (juif) un jour chrétien. « Seigneur », dans le Nouveau Testament et par là dans les premières communautés chrétiennes, est l’appellation (« kurios », en grec) par laquelle est désigné le Ressuscité : « si de tes lèvres tu confesses que Jésus est Seigneur, et si ton cœur croit que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, tu seras sauvé » (épître aux romains, 10, 9). Dire « Seigneur » n’est donc pas une manière comme une autre d’exprimer le caractère divin.

Qu’adviendra-t-il du repos ?

Pour la tradition juive ce repos du 7e jour est intangible. Pour les chrétiens de ce temps du début, qu’ils soient d’origine juive ou d’origine païenne, ce repos du « jour de Dieu » garde l’esprit dans lequel il est présenté par la Genèse et l’Exode. Matériellement les conditions de la vie sociale empêcheront l’observance littérale. Les croyants chrétiens vont s’efforcer de diffuser la notion d’un repos hebdomadaire. Pour leur part ils n’y aboutiront que lorsque l’Empire par l’édit de Constantin (313) deviendra favorable au christianisme et un peu plus tard avec Théodose (383) en fera la « religion officielle ». 

Le Dimanche alors deviendra le jour du repos.

Ce qui est sûr c’est que, dès l’origine, ces chrétiens appelés d’abord « adeptes de la voie » (Actes 9, 2) se réunissent, malgré leurs obligations de travail, ce jour qui est le « Jour du Seigneur ». Des témoignages venant d’observateurs païens l’attestent de façon précise. Certains raisonnent aujourd’hui comme si cette réunion chrétienne avait été placée là à cause de l’opportunité qu’offrait le jour du repos !

Autour de l’Eucharistie

A la lecture des premiers textes chrétiens, apparaît l’évidence que la réunion, le jour où se célèbre la Résurrection, n’est autre que notre Eucharistie. Pour la 1ère épître aux Corinthiens, c’est le « Repas du Seigneur ». Pour les Actes des Apôtres, c’est la « fraction du pain » (Act. 2, 42 – en relation avec Lc. 24, 35). L’Apôtre Paul, faisant escale à Troas, — « le premier jour de la semaine » notent les Actes des Apôtres — prend part à une réunion « pour rompre le pain » (Act. 20, 7). Ainsi, dans l’Église primitive, naît le Dimanche chrétien, inséparable de la foi en la Résurrection et de la célébration qui, dès le IIe siècle, s’appellera l’Eucharistie. (cf. St Justin)

Une création de l’Église, observent certains dans l’intention de relativiser ce rite du Dimanche. Création, oui, mais jaillie de la foi et avec la foi, avant tout de la foi en la Résurrection (« si le Christ n’est pas ressuscité, notre foi est vide, et vide aussi notre prédication » (I Cor. 15, 16). Certes il est fait mémoire de la mort, parce que la Résurrection est celle du Crucifié.

La Messe du Dimanche

Dans une « Église de masse », après que l’Empire ait été gagné au christianisme, l’Eucharistie des communautés souvent très minoritaires, par un effet très compréhensible, est devenue la « Messe » (appellation un peu étrange mais assez tôt répandue). Elle est désormais le fait du grand nombre, non sans l’effet d’un entraînement collectif. Il a fallu rappeler à des chrétiens, à distance de l’esprit des origines, que cette célébration ne pouvait être optionnelle. « Croyant non pratiquant » n’avait aucun sens, pour qui se rappelait le « Repas du Seigneur », « la fraction du pain » des premiers récits. D’où la règle : la Messe du Dimanche obligatoire, est encore « sous peine de péché mortel ». Ce qui peut se traduire : sous peine d’incohérence grave par rapport à l’essentiel de la foi. Et cela demeure, quoi qu’il en soit du langage. « Dimanche est un mot qui n’est autre qu’une traduction française, peu parlante pour nos contemporains », de « Dies dominica » (Jour du Seigneur). Il n’est que de penser à l’italien « domenica », plus proche du latin « dominus » qui signifie Seigneur. 

Évolutions sociétales

Les changements intervenus au cours du temps, dans l’Église elle-même comme dans son rapport à la société, suivent ainsi les évolutions sociétales. 

– Le premier stade est en pleine harmonie avec la foi chrétienne : le Dimanche jour du repos hebdomadaire. Ce qui n’a pu intervenir que dans le contexte d’une imprégnation chrétienne de la société. Et de plus grâce à un transfert au Dimanche de l’esprit du shabbat de la tradition biblique. On comprend qu’un tel déplacement ait pu alimenter à sa manière l’incompréhension entre la communauté juive et les chrétiens.

– Le 2e stade est inévitablement ambigu. Le repos-loisir du Dimanche est devenu le repos-loisir du week-end. Désormais le week-end marque profondément l’organisation de la semaine pour nos contemporains. On pourrait parler d’un Dimanche noyé dans le week-end.

– L’autre stade est celui du travail du Dimanche dans les conditions actuelles de la vie économique. Question qui ne peut être traitée sans considération de l’histoire et des équilibres de la vie sociale. C’est là une autre page qui s’ouvre, une page sociétale aujourd’hui en cours.

Par Gaston Pietri. 

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