Paroisses
La quête en ligne !
Faire un Don
Faire un signalement
Faire dire une messe

Le Dio vi salvi Regina

madunucciaSouvent, le splendide « Dio vi Salvi Regina » retentit dans nos églises insulaires ; l’histoire de ce chant est-elle connue ?

Des racines chantées anciennes

Une tradition orale et villageoise, sincère mais fautive, affirmait que c’était l’œuvre, en 1730, d’un berger corse, nommé Sauveur Costa ! Le « Dio vi Salvi Regina » dépasse ce cadre légendaire. D’où vient-il ? D’abord, d’une prière chantée, en langue latine, œuvre d’un évêque du Puy en 1080, Adhémar de Monteil, qui, devenu chef des premiers Croisés, mourut de la peste à Antioche  en 1098. Sa bannière portait l’image de Marie. Il composa donc le chant originel, le « Salve Regina ». Des ordres monastiques propagèrent le chant dans toute l’Europe. Mais il se rattache aussi à des chrétiens en Orient et d’Orient, via l’éclat du latin !

Royauté de Marie en Corse

Le « Dio vi Salvi Regina », si cher à la Corse, est sans le moindre doute l’éclatante adaptation de ce premier chant du légat papal et croisé de Monteil, entonné par les Chrétiens en Orient puis en Occident ! Témoignage de ferveur plus que de violence et de guerre, entre l’Orient et l’Europe et enfin entre Gênes et la Corse, c’est dire qu’il reste malgré son ancienneté un chant actuel et vivant, un chant religieux catholique, puissamment chrétien, un absolu et universel signe de confiance et d’hommage envers Marie, première image et incarnation de la confiance chrétienne, de la confiance donnée par une toute jeune fille engagée, presque seule et immédiatement, face à l’Annonciation et à la demande du Père !

Avant donc d’être choisi par les chefs corses en janvier 1735 , chefs et peuple dressés contre le despotisme génois (lequel en tant que force et autorité publiques était inapte d’abord à rendre la justice dans notre île depuis trop longtemps), l’éloge chanté de Marie existait donc et de très longue date ; il ne fut pas le seul symbole marial du Royaume corse : on choisit « pour sa protection, l’Immaculée Conception de la Vierge Marie dont l’image sera empreinte sur ses armes et ses étendards : on en célébrera la fête dans tous les villages avec des salves de mousqueterie et de canons ». Ce chant réadapté et spectaculaire est l’œuvre, entre 1676 et 1681, d’un grand prédicateur et compositeur officiant à Naples, Francesco de Geronimo. Il fut repris par des chorales de rues à Naples, pendant ses sermons ! Succès total, l’hymne devint une prière quotidienne des Jésuites et se répandit dans les couches populaires. Le prêcheur-compositeur s’adressait à une foule de pécheurs et pécheresses.

De Naples à la Corse

Entré en Corse, via les publications du clergé génois, par l’enseignement jésuite et franciscain puis par de nombreux Corses installés à Naples dès la fin du dix-septième siècle, l’hymne marial fut modifié, donc, en 1735 : on passa de la victoire demandée contre les ennemis de la Vierge et des femmes malheureuses ou des hommes qui, sous sa protection bienveillante, allaient au repentir, à un triomphe réclamé contre les ennemis du Royaume marial de notre île, une île alors protégée par l’innocence absolue incarnée par Marie ! Forgé originellement entre l’Orient et l’Occident, parcourant l’Europe, arrivant en Corse, ce chant devenu « national » et rigoureusement symbole de dévotion ou de ferment marial est resté un pont, une passerelle entre des générations de Corses séculaires, mais aussi ou surtout : la garantie contemporaine d’un lien maintenu avec les plus anciennes formes et manifestations des grandes traditions de ferveur du catholicisme dans l’espace méditerranéen comme au cœur de l’Europe ! En ce sens, la leçon d’espérance chantée par les strophes du « Dio vi Salvi Regina » est constante, universelle et d’une étonnante puissance et étendue géographique, une géographie concrète autant que spirituelle, absolue et complète, vibrante et non pas figée : celle des pierres, des hommes et des âmes.

Par R. Lahlou

Partager